Le mois dernier, notre ministre du tourisme m’a informé que de très jeunes visiteurs s’aventuraient parfois au Kikimundo. Comme on est en période de vacances scolaires, je me suis dit qu’il serait bien de faire quelque chose pour nos petits amis. J’ai donc essayé de trouver un programme qui pourrait convenir aux plus jeunes. Mais par où commencer ? Qu’est-ce qui pourrait bien plaire aux enfants ? C’est qu’elle est loin, ma jeunesse.
Et puis l’autre jour, en farfouillant dans mes vieux disques, je suis tombé sur un 45 tours que j’écoutais beaucoup quand j’étais petit : La maison de Toutou.
La maison de Toutou était l’une des séries à marionnettes qui connurent un grand succès dans les années 60. Elle était diffusée sur la première chaine de l’ORTF entre 1967 et 1973, à raison d’un épisode par mois.
Monsieur Toutou vit dans une petit maison à la campagne. Il est bricoleur et s’occupe de son jardin. il aime aussi pêcher les poissons rouges dans son bassin. Il cohabitent paisiblement avec Mademoiselle Zouzou, une chatte d’intérieur maligne et parfois moqueuse. Un matin, Toutou et Zouzou font la connaissance de leur nouvelle voisine, Madame Kiki.
Attention ! Ne vous laissez pas tromper par l’homonymie. La Madame Kiki de cette histoire n’est pas ma charmante épouse, c’est une petite grenouille curieuse et coquette. Je tiens à préciser cela car Mon Amour est très susceptible et elle n’apprécie pas du tout qu’on la compare à un animal (voir les commentaires sur cet article). Alors s’il vous plait, évitez les plaisanteries sur le sujet, parce que je risque encore de me faire battre…
Madame Kiki travaille à la météo. Tous les trois vont vite devenir les meilleurs amis du monde. A la fin de chaque épisode, Monsieur Toutou prononce une phrase qui commence par : « Je suis un bon gros Toutou … » (bien attrapé, gourmand, rêveur…)
Voici donc, pour nos petits amis, un épisode de La maison de Toutou.
C’est toujours avec bonheur que je retrouve cette série. Mais elle me rappèle également un souvenir pénible.
Je devais avoir sept ou huit ans. C’était l’été. Et comme tous les étés, ma sœur et moi étions partis un mois en colonie de vacances. Ma maman profitait de notre absence pour faire un peu de rangement. Cette année là, elle avait décidé de donner quelques uns de nos jouets à une de ses collègues. Elle avait fait sa sélection et avait attendu qu’on soit rentré pour nous demander notre avis. Quelques jours après notre retour, elle sortit un grand sac en plastique du placard et m’invita à l’ouvrir :
– Tiens, regarde. C’est des vieux jouets à vous que je veux donner. Tu est d’accord ?!?
Le sac était rempli de hochets, de cubes multicolores et autres jeux éducatifs dont j’avais gardé un souvenir lointain. Mais au milieu de cet amoncèlement de formes diverses aux couleurs variées, j’ai vite reconnu une silhouette très familière. Celle de Monsieur Toutou. Mon Monsieur Toutou. C’était un jouet en plastique d’environ trente centimètres qui, à l’origine, devait faire « pouêt pouêt » quand on lui appuyait sur le ventre. Lorsqu’on l’agitait, ses oreilles en simili fourrure bougeaient comme celles d’un vrai chien. Il portait son éternelle salopette et tenait devant lui un petit arrosoir vert. Je l’avais eu à mon premier anniversaire et j’y étais très attaché. Quand j’étais petit, j’avais une affection particulière pour certains de mes jouets. Une affection très forte comparable à celle qu’on peut avoir pour quelqu’un de sa famille. Monsieur Toutou était un de ceux là. Vous comprenez donc quel fut mon émoi quand je l’ai aperçu dans le sac :
– | Tu veux donner Monsieur Toutou ?!? |
– | Ben oui. Tu es grand maintenant, et tu ne joues plus avec. |
– | Mais c’est Monsieur Toutou… |
– | Tu sais, c’est pour des gens qui n’ont pas beaucoup de sous. Ils ne peuvent pas acheter des jouets à leurs enfants. |
– | Oui, mais c’est … |
– | Et puis toi, tu en as plein d’autres, des jouets. Tu peux bien donner ceux-là à des petits enfants malheureux. Hein ? |
– | Oui, mais… |
– | Hein ?!? Pour les petits enfants malheureux… |
– | … |
– | D’accord ? |
Et j’ai dit oui. Le cœur gros, j’ai vu disparaitre mon Monsieur Toutou dans le grand sac en plastique.
Cette histoire m’a profondément marqué, et un tiers de siècle après, ma mère entend encore parler du jour où elle m’a forcé à donner Monsieur Toutou. Je la taquine un peu. Je sais bien qu’elle a compris que ce jour là, elle avait fait une grosse boulette, mais j’adore la voir essayer de se justifier :
– | Mais je t’avais demandé… Il fallait le dire que tu voulais le garder ton Monsieur Toutou ! |
– | Ah ouais ?!? Et tu crois vraiment que j’avais le choix ? |
– | Ben je t’ai demandé … |
– | Et le coup de petits enfants malheureux. Tu crois que c’était loyal ça ? C’est comme la mère Chirac qui pique aux mômes leur argent de la petite souris à coup de bons sentiments. C’est du racket ! |
– | Alors tu m’en voudras toujours ?!? |
– | Mais non La Moune, je ne t’en veux pas. Mais quand même, c’était Monsieur Toutou… |
Moralité : Ne forcez pas vos enfants à donner leurs jouets, vous pourriez en entendre parler très longtemps.
Si vous tenez absolument à vous débarrasser de certaines de leurs affaires, faites le sans rien dire. Et s’ils se rendent compte que des jouets ont disparu, inventez une histoire. Dites par exemple qu’un voleur les a pris ou qu’ils ont été enlevés par des extraterrestres, mais ne leur faites pas le coup des petits pauvres. C’est trop cruel. Racontez leur plutôt N’importe-quoi.
Pour finir voici une des histoires extraite de mon disque. Celle que je préférais et qui me rapprochait d’avantage de Monsieur Toutou. Le son n’est pas très bon, mais le disque est vieux et usé. Il a tellement servi qu’il craque de partout. (Comme moi !)